Jean-Noël Barrot, le ministre français des Affaires étrangères a laissé entendre que l’Algérie a demandé à 12 membres du personnel de l’ambassade de France de quitter le pays dans les 48 heures. Il précise que cela est lié à l’inculpation de trois algériens en France vendredi 11 avril, dont l’un est un fonctionnaire consulaire.
Les inculpés sont accusés d’avoir participé à l’enlèvement, l’année dernière, d’Amir Boukhors, 41 ans, un critique virulent du gouvernement algérien qui jouit d’une audience de plus d’un million de personnes en ligne. Il aurait obtenu l’asile en France en 2023. M. Barrot a exhorté l’Algérie à « renoncer » aux expulsions et a déclaré que la France était prête à « réagir immédiatement » si elles se poursuivaient.
Boukhors, également connu sous le nom d’Amir DZ, vit en France depuis 2016. Il a été enlevé en avril 2024 dans la banlieue sud de Paris et libéré le lendemain, selon son avocat Eric Plouvier. Me Plouvier a déclaré à l’agence de presse AFP que M. Boukhors avait été « l’objet de deux agressions graves, l’une en 2022 et l’autre dans la soirée du 29 avril 2024 ».
Les médias français ont rapporté qu’il avait été forcé à monter dans une voiture munie d’un gyrophare par de « faux policiers », puis relâché le lendemain dans un bois sans explication. Les autorités algériennes accusent l’influenceur d’être « un saboteur lié à des groupes terroristes ». Le pays nord-africain a émis neuf mandats d’arrêt internationaux à son encontre, l’accusant de fraude et d’association avec des organisations terroristes.
Il nie ces allégations. En 2022, les tribunaux français ont rejeté les tentatives d’extradition vers l’Algérie. Cette affaire est la dernière en date d’un nombre croissant d’incidents qui ont exacerbé le fossé entre la France et l’Algérie. Il s’agit notamment de l’arrestation et de l’emprisonnement en Algérie de l’auteur franco-algérien Boualem Sansal, accusé de porter atteinte à l’intégrité territoriale de l’Algérie.
L’année dernière, l’Algérie a rappelé son ambassadeur de Paris après que la France a soutenu la revendication du Maroc sur le territoire contesté du Sahara occidental. Parmi les 12 fonctionnaires français priés de partir lundi figurent certains membres du ministère français de l’Intérieur, a indiqué une source diplomatique à l’AFP.
Lundi, M. Barrot a déclaré : « Je demande aux autorités algériennes de renoncer à ces mesures d’expulsion… si la décision de renvoyer nos fonctionnaires est maintenue, nous n’aurons pas d’autre choix que de réagir immédiatement ». M. Barrot a affirmé que ces expulsions étaient une réponse à la mise en examen de trois ressortissants algériens vendredi à Paris – dont le fonctionnaire consulaire – pour enlèvement, détention arbitraire et séquestration et participation à une organisation terroriste.
Le ministère algérien des Affaires étrangères a déclaré avoir convoqué l’ambassadeur de France, Stéphane Romatet, pour « exprimer sa vive protestation » et a demandé la libération immédiate du fonctionnaire, selon l’agence de presse officielle algérienne. Le ministère a ajouté que la personne « a été arrêtée en public puis placée en garde à vue sans notification par les voies diplomatiques ».
Le ministère a affirmé qu’il ne s’agissait pas d’une coïncidence, mais d’un événement qui s’inscrit dans un contexte très précis et qui vise à entraver le processus de relance des relations bilatérales. Des mesures timides ont été prises pour réparer les relations entre les deux nations, avec un appel téléphonique entre le président français Emmanuel Macron et le président Abdelmadjid Tebboune qui a eu lieu en mars.
« Les deux présidents ont eu un long échange franc et amical sur l’état des relations bilatérales et les tensions qui se sont accumulées ces derniers mois », peut-on lire dans un communiqué conjoint. Après une visite officielle en Algérie le 6 avril, au cours de laquelle il a rencontré M. Tebboune, M. Barrot a déclaré qu’il espérait une « nouvelle phase » dans les relations.
